Je choisis mes mots pour traduire un sentiment qui est en moi, un trémolo un ressenti obstinément les autres regardaient les garçons j’avais en moi d’autres horizons j’avais le coeur qui débattait pour de douces et singulières beautés
est-ce phénoménal est-ce fondamental est-ce phénoménal une fille qui aime une fille
derrière les soirs et les nuits noires un peu d’ennui, un peu de folie des envolées exploratoires une histoire belle et alanguie dans nos regards autant de vers que d’éclaircies et coups de tonnerre nos âmes se déshabillent une fille qui aime une fille
est-ce phénoménal est-ce fondamental est-ce phénoménal une fille qui aime une fille
depuis des lunes je n’en dors plus est-ce que le monde m’aimera encore je crois aux fleurs d’autres vertus comme le miroir des corps à corps je désire être celle que je suis aussi un peu celle que tu es embrasser ta peau de paradis ne plus jouer à guerre et paix
est-ce phénoménal est-ce fondamental est-ce phénoménal une fille qui aime une fille
dans tes bras c’est l’Alhambra et tes yeux m’emmènent aux cieux nos voyages n’en finissent pas aux pays vertigineux j’habite l’ivresse, la volupté des champs de blé inespérés nous sommes ce que nous sommes allons croquer toutes les pommes
est-ce phénoménal est-ce fondamental est-ce phénoménal une fille qui aime une fille une fille qui aime une fille
Quelle est cette tige à cinq branches Jetée en travers de mon corps Est-ce une main profonde et fluide Est-ce l’ombre tremblante d’un oiseau Quels sont ces cinq Grands Lacs Flottant comme de grandes fleurs sur ma poitrine Fleuve dont les flots m’entraînent m’enchaînent J’apprendrai la phrase âpre et belle de tes rives
*
Je souffle sur les œufs brûlants du temps J’émiette la terre dans ma bouche Je respire l’odeur des racines Une figure bouge au plus clair de l’oracle
Trouverai-je jamais réponse
Animal je crie à contre-vent Ô terre où le soleil est beau Ce jour est déjà une éternité Et ma main cherche sans comprendre
Le monde est une grande blessure incompréhensible.
*
Mon front d’humus et de vents verts Mon front raconte l’infaillible souvenir J’ordonne une sombre forêt Je creuse le frisson du fleuve
L’événement me révèle tous mes visages.
*
Je prends dans mes mains le cœur du monde Je regarde ma solitude Rien n’a de prix qui n’est donné Rien ne vit qui n’est partagé
Le monde est un grand amour qui se cherche.
*
Notre sang fleurira sur les veines du sol
Notre langue a le poids de nos poings nus
Notre jeunesse affirme un songe nécessaire
Car nos yeux sont les yeux souffrants de l’arbre
Nos bouches sont des feuilles en plein vent
Et nos bras des branches portant la pluie
Et toute la mémoire su soleil
Mon pays a franchi ses frontières de mort
Mon pays sort debout sur le seuil du printemps
Là-bas à l’Est un fleuve se mêle à la mer
La mer a pris mon pays par la main
Pour la douceur et les tourments du monde…
*
Ma bouche est une double cicatrice
Un double horizon découpe mes yeux
Vulnérable on m’a jeté parmi les hasards
Je ferai une échelle de mon corps
Et étendrai mes bras en largeur de la terre
Je me tiendrai debout entre deux vents contraires
Mon enfance est un sapin plein de neige
Mon enfance est un prisme dans l’espace.
*
Gatien Lapointe, poète, prof. et éditeur (Sainte-Justine-de-Dorchester, 18 déc. 1931 — Trois-Rivières, 15 sept. 1983). Surtout connu pour son Ode au Saint-Laurent, il est aussi l’auteur d’une oeuvre abondante regroupant une dizaine de recueils. Il étudie d’abord au petit séminaire de Québec, puis à l’École des arts graphiques de Montréal et à l’Univ. de Montréal, où il obtient une maîtrise en littérature. Il publie Jour malaisé en 1953 et Otages de la joie deux ans plus tard. Il voyage ensuite en Europe de 1956 à 1962 et suit des cours au Collège de France et à la Sorbonne. En 1962, on lui décerne le prix du Club des poètes pour Le Temps premier. De retour au Québec, il mérite le prix Du Maurier, le prix de la province de Québec et le PRIX LITTÉRAIRE DU GOUVERNEUR GÉNÉRAL pour l’Ode au Saint-Laurent, parue en 1963. Il est à nouveau récipiendaire du prix de la province de Québec en 1967 pour Le Premier Mot. Il enseigne alors au collège militaire, à Saint-Jean-sur-Richelieu.
Il devient prof. à l’Univ. du Québec à Trois-Rivières en 1969. Parallèlement à son enseignement, il fonde et anime les Écrits des Forges, maison d’édition presque exclusivement orientée vers la poésie. En 1980, après 13 ans de silence, il reprend la publication de son oeuvre. Paraissent alors successivement Arbre-radar, Barbare inouï, Corps et graphies, Corps de l’instant et Le Premier Paysage. Dans ces derniers recueils, le poète s’éloigne du lyrisme et du thème du pays pour se tourner vers le corps et l’instant avec un sens aigu de la modernité. Cependant, on y ressent toujours la même intensité, la même sensibilité et la même exigence qui font l’unité et la valeur de son oeuvre, l’une des plus riches de la poésie québécoise.
cette histoire n’ira pas bien on meurt à la fin piétiné par un cheval gris pommelé c’est une histoire qui fait du bruit les sabots le sang maintenant courez
*
le chant de Perceval est une bête difficile une histoire qui hurle je suis une bête difficile
*
c’était l’été il y avait la belle que voilà bleu myosotis pendant que Perceval tombait tu jouais une berceuse de Brahms
*
je ne saurai pas t’expliquer les vagues comme l’extrême fixité des choses qui passent
*
le cœur est sans doute une histoire au plus un bruit certains diront : murmure quelque chose a parlé tout bas de recommencer les vagues
*
tout cela se passe en une journée imagine le soleil mon amour mort quelque chose a erré brûlé mes yeux
*
tu aimes les mouettes c’est beau à voir les oiseaux tristes, dis-tu je trouverai une fin fabuleuse les bateaux retiendront leur souffle tu peux te reposer
*
la maison s’est tue après le ciel deux ormes déchirés cette nuit-là pendant que tu tombais une louve allaitait Rome pour réparer le monde
*
Finaliste du Prix du Gouverneur général du Canada
Tania Langlais est née à Montréal en 1979. Elle détient une maîtrise en études littéraires, profil création, de l’UQÀM. Elle a participé à plusieurs lectures publiques, entre autres au Festival Voix d’Amériques et au Festival de Poésie de Trois-Rivières. On retrouve ses textes dans de nombreuses anthologies au Québec et à l’étranger. En 2000, à 20 ans, elle a remporté le Prix Émile-Nelligan avec son recueil Douze bêtes aux chemises de l’homme, ce qui en fait la plus jeune lauréate à ce jour. De plus, elle a remporté le Prix Jacqueline-Déry-Mochon en 2001, le Premier Prix de poésie de Radio-Canada en 2002 et le Prix Joseph-S. Stauffer en 2005. Elle enseigne le français au niveau collégial et pratique l’équitation.
Mes forêts sont de longues traînées de temps elles sont des aiguilles qui percent la terre déchirent le ciel avec des étoiles qui tombent comme une histoire d’orage elles glissent dans l’heure bleue un rayon vif de souvenirs l’humus de chaque vie où se pose légère une aile qui va au cœur
mes forêts sont des greniers peuplés de fantômes elles sont les mâts de voyages immobiles un jardin de vent où se cognent les fruits d’une saison déjà passée qui s’en retourne vers demain
mes forêts sont mes espoirs debout un feu de brindilles et de mots que les ombres font craquer dans le reflet figé de la pluie mes forêts sont des nuits très hautes
*
Il fait un temps d’insectes affairés de chiffres et de lettres qui s’emmêlent sur la terre souillée un temps où soufflent des vagues au-dessus des vagues
dans nos corps il fait un temps d’arn de ram zip et chus sdf et vip il fait triple k usa made in China un temps de ko pour nos émerveillements il fait casse-gueule un bruit de ferraille déchire le paysage comme un vêtement usé
il fait refus et rejet un temps de pixels d’algorithmes qui nous projettent sur des routes invisibles avec l’avenir comme promesse que le vent dévore aussitôt un peu d’écorce et de feu au creux de la main il fait chimère et rêve de rien du tout un siècle de questions rudoyées
le bord d’une falaise où chutent nos poèmes et la neige nous apprend à perdre tout ce que l’on perdra
*
Je n’ai rien déposé au pied du chêne rien à l’ombre du saule
je ne me suis adressée ni aux faibles ni aux puissants
je n’ai pas vu le veilleur à l’entrée de la mer pas vu le jardinier cueillir le crocus
d’un printemps pas trouvé le miel et la soie
pas vu le ciel dans l’étang quelque chose de la solitude rien qui laisse paraître la déchirure
je me suis assise au milieu de ces vastes alliés sans voix le temps continue de s’infiltrer dans la terre gorge les rochers
le pas des animaux s’accorde à la lumière par la lenteur du monde je me laisse étreindre je n’attends rien de ce qui ne tremble pas
*
Ce sera comme un souvenir qui s’ouvre. ce sera une main avec de longues lignes enchevêtrées la langue de nos destins impossible à lire. ce sera la sensation du corps dans les humeurs de la terre
ce sera comme une soif de clairière dans le fracas des ombres l’empreinte d’un avenir plus haut que la forêt. ce sera l’épine indécise entre l’écorce et le noyau
ce sera un peu de lumière pour décider du paysage
Son nom semble la relier à une constellation, mais sa présence au monde la rend indissociable des paysages qu’elle traverse : Hélène Dorion vit environnée de lacs et de forêts, de fleuves et de rivages, de brumes de mémoire et de vastes estuaires où la pensée s’évase. Dans ce recueil voué aux forêts, elle fait entendre le chant de l’arbre, comme il existe un chant d’amour et des voix de plain-chant. « Mes forêts… », dit-elle dans un souffle qui se densifie de poème en poème. Et l’on entre à pas de loup dans une forêt de signes où l’on déchiffre la partition de la vie sur fond de ciel, sur fond de terre, sur fond de neige, de feuillages persistants et de flammes qu’emporte le vent, de bourgeons sertis dans l’écorce et de renouvellement. Un chemin d’ombres et de lumière, «qui donne sens à ce qu’on appelle humanité».
Hélène Dorion est née à Québec le 21 avril 1958. Elle y a fait ses études primaires et secondaires, au Collège Notre-Dame-de-Bellevue, puis ses études collégiales au cégep de Sainte-Foy, avant d’entrer à l’Université Laval où elle obtient, en 1980, un baccalauréat en philosophie, et en 1982 une maîtrise en lettres. Membre de la rédaction de la revue philosophique de la faculté, Considérations, elle y publie des textes de réflexion portant entre autres sur les présocratiques, Nietzsche et Camus. Un passage s’opère alors de la philosophie à la littérature, et en même temps qu’elle entreprend des études en lettres qui mèneront, en 1985, à l’obtention d’une maîtrise. Elle publie ses premiers poèmes en 1981 dans la revue Estuaire. L’année suivante, elle se joint au comité de rédaction de cette revue et y rencontre Suzanne Paradis et Michel Beaulieu qui l’inciteront à présenter son premier manuscrit, L’intervalle prolongé suivi de La chute requise, aux Éditions du Noroît qui le publieront en 1983.
En 1984, elle quitte Québec pour les Laurentides qu’elle habitera jusqu’en 2009. Elle enseigne la littérature durant six ans au cégep de Saint-Jérôme et continue à déployer une activité plurielle en s’impliquant dans la vie littéraire à différents titres : critique, membre de la rédaction de revues et collaboratrice à des émissions culturelles radiophoniques. En 1987, elle fait un premier séjour en Europe. Ses poèmes commencent alors à paraître dans diverses revues françaises et belges, et peu à peu ils seront traduits et publiés dans de nombreuses revues européennes. En 1990, une anthologie de ses poèmes paraît aux Éditions Le Dé Bleu, sous le titre La vie, ses fragiles passages, et le même éditeur publie, en coédition avec le Noroît, Un visage appuyé contre le monde.
En 1991, elle devient directrice des Éditions du Noroît. Durant cette période qui durera dix ans, en plus d’être éditrice, elle réalise une série audio de poésie et musique, conçoit et présente au Québec et en Europe des lectures-spectacles, prépare des anthologies de poètes québécois et préface de nombreux ouvrages. On lui doit entre autres une anthologie de poèmes de Saint-Denys Garneau.
En 1993, les directeurs des Éditions de la Différence, Colette Lambrichs et Joaquim Vital, l’invitent à publier dans leur maison. Elle y fera paraître par la suite tant ses livres de prose que de poésie. En 1994, elle participe pour la première fois à la Biennale internationale de poésie de Liège. Ses voyages commencent alors à se multiplier, en même temps que les traductions de ses livres, ce qui l’amène à participer à de nombreuses lectures publiques ainsi qu’à des colloques et festivals. Son œuvre reçoit plusieurs distinctions et prix littéraires au Québec et à l’étranger, et des revues européennes lui consacrent des dossiers et des numéros spéciaux. En même temps, son activité littéraire se diversifie : elle est membre de comités de rédaction de revues européennes et prépare à ce titre plusieurs numéros consacrés à la poésie québécoise, elle est lectrice pour des maisons d’édition et fait aussi partie de nombreux jurys, dont celui du prix francophone de poésie Louise-Labé. De 1999 à 2001, elle est écrivaine en résidence à l’Université du Québec à Montréal puis à l’Université de Montréal. Elle anime en outre des ateliers d’écriture. En 2002, elle tient une chronique régulière dans le magazine Relations.
Hélène Dorion est aussi l’auteure d’une quinzaine de livres d’artistes, ce qui l’a amenée à collaborer avec de nombreux artistes visuels québécois et européens.
Dans sa présentation de l’anthologie intitulée D’argile et de souffle parue en 2002 dans la collection de poche Typo, Pierre Nepveu écrit dans sa présentation de l’œuvre de Hélène Dorion : « nous avons besoin de sa quête intérieure, de cette immensité du dedans, de ce vent de l’âme que sa poésie ne cesse de faire souffler et de faire entendre, comme pour laver notre monde de ses scories, de ses bruits inutiles, de ses enjeux mesquins, afin d’y dégager un espace pur et un temps de vivre». Dans les années suivantes, elle publiera Jours de sable, roman pour lequel elle recevra le prix Anne-Hébert, en plus d’être en lice pour le prix des Libraires et le prix Spirale, et fera aussi paraître Sous l’arche du temps, un essai sur l’art et la création qui est suivi d’entretiens, de même que La vie bercée, un album pour la jeunesse illustré par Janice Nadeau, et qui sera en lice pour trois prix au Québec et en Europe.
En 2005, elle devient la première Québécoise à se voir décerner le prix de l’Académie Mallarmé, remis pour l’ensemble de son œuvre, à l’occasion de la parution de Ravir: les lieux. Ce livre lui vaudra aussi le prix du Gouverneur général du Canada.
En 2006, les Éditions de l’Hexagone font paraître une rétrospective de son oeuvre poétique intitulée Mondes fragiles, choses frêles et qui fait plus de huit cents pages. La même année, elle est élue membre de l’Académie des lettres du Québec et nommée Chevalière de l’Ordre national du Québec. Elle est aussi invitée à se joindre au comité de direction de la « Rencontre québécoise internationale des écrivains » et au comité de rédaction de la revue « Les Écrits ».
En 2008, lorsqu’elle reçoit le prix Charles-Vildrac pour son livre Le Hublot des heures, elle est alors la première Québécoise à recevoir un prix de la Société des Gens de Lettres de France.
En 2009 a lieu un colloque sur son œuvre à l’Université Paris-Nanterre, en collaboration avec l’UQAM, sous la direction de Jean-Michel Maulpoix et Évelyne Gagnon.
En 2010, elle publie L’Étreinte des vents pour lequel elle reçoit le prix de la revue Études françaises de l’Université de Montréal. Cette même année, elle est nommée Officière de l’Ordre du Canada.
En 2011, elle tient une chronique régulière dans le magazine Spirale. Elle reçoit aussi, pour l’ensemble de son œuvre, le prix européen Léopold-Senghor.
En 2012 elle fait paraître, aux Éditions de l’Hexagone, Coeurs, comme livres d’amour, finaliste aux prix du Gouverneur général du Canada, du Conseil des Arts et des Lettres du Québec, Marcel-Thiery et du Festival de poésie de Montréal.
En 2014, elle publie aux Éditions Druide Recommencements, roman salué par la critique et accueilli par un large public. Elle reçoit le prix des Écrivains francophones d’Amérique. Cette même année, elle se voit décerner une bourse de résidence de la prestigieuse Fondation newyorkaise Civitella Ranieri et séjourne à Umbertide, en Italie. À la suite de cette résidence d’artistes paraîtra Le temps du paysage, récit accompagné de ses photographies.
Son œuvre s’est méritée de nombreux prix littéraires (prix Alain-Grandbois, prix Aliénor, prix Wallonie-Bruxelles, prix du Festival de Roumanie), et elle est régulièrement invitée à présenter son travail au Québec et au Canada, en Europe, en Amérique latine et aux États-Unis. Ses livres sont traduits et publiés dans plus de quinze langues, notamment en anglais, en espagnol, en catalan, en italien, en macédonien, en russe, en serbe et en allemand.
Des thèses, des mémoires et des numéros de revues ont été consacrés à son œuvre, de même qu’un ouvrage collectif intitulé Nous voyagerons autour de l’être, et qui regroupe les collaborations d’auteur-es et de critiques.
Artiste multidisciplinaire, elle expose régulièrement de ses photographies, conçoit et présente des concerts littéraires, en plus de collaborer avec des compositeurs.trices et des chanteurs.ses.
Hélène Dorion a tenu durant quelques années une chronique régulière intitulée «Questions de sens» dans la revue Relations et a aussi collaboré avec l’Opéra de Montréal.
En 2015, l’orchestre Les Violons du Roy l’invite à concevoir avec eux un spectacle dans lequel elle lit de ses textes avec un quatuor à cordes. Ce concert littéraire, intitulé Au creux du temps, a été présenté à de nombreuses reprises, notamment à la Cinquième salle de la Place des Arts à Montréal et au Palais Montcalm à Québec.
En 2016, elle publie Le temps du paysage, ouvrage primé au Concours LUX (catégorie «Livre de photos») et finaliste au prix du Conseil des Arts et des Lettres du Québec, au prix Marcel-Couture du Salon du livre de Montréal et au prix Louis-Guillaume en France. Ce récit avec photographies a fait aussi l’objet d’une exposition qui a été présentée à Montréal, à Québec, en Estrie, dans les Laurentides et dans le Bas-Saint-Laurent.
Son livre de poèmes, Comme résonne la vie, paru en 2018 aux Éditions Bruno Doucey, fait l’objet d’un concert littéraire conçu avec l’orchestre Les Violons du Roy.
En mars 2020, elle publie aux Éditions Alto un roman intitulé Pas même le bruit d’un fleuve accueilli favorablement par la critique et un large public. Lauréate du Prix du Conseil des Arts et des Lettres du Québec – Artiste de l’année en Estrie 2020, les membres du jury ont mentionné que « cette écrivaine prolifique collabore à une multitude de projets rassembleurs où les disciplines convergent. Généreuse et très présente dans sa communauté, elle participe à la vie culturelle estrienne en prenant part à divers événements, rencontres et tournages ».
À l’automne 2021 paraît aux Éditions Bruno Doucey un nouveau livre de poèmes intitulé Mes forêts.
Pour sa contribution remarquable à la littérature québécoise, elle a reçu le prix Athanase-David 2019, la plus haute distinction décernée par le Gouvernement du Québec en littérature. Le jury a ainsi commenté : « Avec simplicité et beauté, ses ouvrages sondent l’intime de l’être. Ils invitent à la réflexion sur le sens de l’existence humaine. Courts, fluides et profonds, ses textes à la trompeuse facilité reflètent plutôt une écriture maîtrisée. Par la modernité de ses écrits, leur sagesse et leur intégrité, l’écrivaine jette un regard sur les défis que rencontre le monde actuel. »
Quelques photos de la performance de sortie de résidence de David Leduc//Le Grand Slack au parc Jean-Narrache. Complices de slam: Antoine Leclerc et Annie Girard, performance du poète José Acquelin et micro-ouvert Merci David pour cette soirée où il a fait bon de parler, pour citer Jean-Narrache, « franc et cru », et pour toustes celleux qui « parl’nt jamais »
Un violet, violet, qui tire sur le pourpre et le mauve.
Et le noir, ici, est ourlé d’un blanc d’argent, poudré, crayeux ou très lunaire.
Des verts pastels.
Un jaune japon presque irisé.
*
Dans ton corps Tant de courbes
Se croisent
Il y a Tant de silences
A déplacer
Que nous finirons En miettes.
*
À combien d’anges A-t-on déjà parlé ?
Combien d’autres Entrevus
Dans ce creux d’une épaule,
Dont nous cherchons Les traces encore
À genoux ?
Combien d’autres si bien, Si mal ignorés,
À qui, Désormais, Nos yeux
Vont manquer ?
*
Que seraient
La houle et la marée,
Sans rêve,
Ni falaise à creuser,
‒
Sans cet horizon
Qui les dresse
Au-delà,
‒
Au-delà
Des forces qu’il faut
Pour écoper la lumière
Des corps
Qui sombrent
Et se dispersent ?
*
Né en 1956, Emeric de Monteynard vit et travaille à Paris, mais c’est dans la Hague, face à la mer, qu’il se ressource et assemble ses mots, à haute voix, pour que ceux-ci sonnent ce qu’ils disent. En 1992, il rencontre Guillevic avec qui il se lie. Mais c’est son professeur de français, Joseph Pérard, un ami de Max Jacob, qui lui fera goûter à ce toucher si particulier des mots.
« À lire autant de sensualité et de sensibilité, vous ouvrez une voie. Il y a en vous, une exigence, un besoin de netteté, de pureté oserais-je dire, que vous exprimez fort bien » (Guillevic).
Trois de ses recueils de poésie ont été remarqués et soutenus par le CNL. Un autre a reçu le Prix Amélie Murat. http://www.emericdemonteynard.fr
Bibliographie
– Devenir chemin, L’Arbre à paroles, 2020 – Ecalgrain, L’Arbre à paroles, 2018 – Force est d’écrire aimer, L’Arbre à paroles, 2017 – Ecoper la lumière, L’Arbre à paroles, 2015 – Pétra, s’égarer vers le ciel, Tertium éditions, 2014 – Aimer, le dire, Maelström, collection bookleg, 2014 – Ce qui, la nuit, L’Arbre à paroles, 2012 – Aux arbres penchés, L’Arbre à paroles, 2006 – Prix Amélie Murat 2008 – Toucher les doigts du sourcier, Eclats d’encre, avec le soutien du CNL 2004 – Flanqué d’un sourire, Del Arco, 2004 – Dans ce tremblé des dires, Eclats d’encre, avec le soutien du CNL 2003 – Concéder l’or et le bleu, Eclats d’encre, avec le soutien du CNL 2002 – Aimer, le dire, Eclats d’encre, 2001 – Le Petit homme qui brûlait, Editions du Laquet, 2001
La poésie c’est refuser la vie – partie par partie – pour l’accepter toute entière –
*
J’ai vite enlevé cette espèce de pansement arbitraire
je me suis retrouvé libre et sans espoir
comme un fagot ou une pierre
je rayonne
avec la chaleur de la pierre
qui ressemble à du froid contre le corps du champ
mais je connais la chaleur et le froid
la membrure du feu
le feu
dont je vois la tête
les membres blancs.
*
L’absence qui me tient lieu de souffle recommence à tomber sur les papiers comme de la neige. La nuit apparaît. J’écris aussi loin que possible de moi.
*
J’ouvre mon cahier devant la montagne quand la montée me force à ralentir j’écris terre tenace à laquelle j’adhère comme si la montagne venait s’asseoir sur mes yeux.
*
Le jour qui s’ouvre à cette déchirure, comme un feu détonnant. Pour qui s’arrête auprès des lointains. Le même lit, la même faux, le même vent.
*
André du Bouchet passe son enfance en France jusqu’à la débâcle de 1940 qui le jette sur les routes, avec le dictionnaire Bailly de grec sous le bras. Sa famille s’exile aux États-Unis où il passe son adolescence, et mène ses études à l’université d’Harvard, devenant même professeur d’anglais.
André du Bouchet revient en France à la fin des années 1940, et commence à écrire des critiques sur Victor Hugo, Baudelaire ou Shakespeare. Ses premiers écrits poétiques des années 1950 paraissent sous la forme de plaquettes qui seront plus tard refondues dans son opus majeur, Dans la chaleur vacante .
Parallèlement à son travail poétique, André du Bouchet écrit des livres de critiques d’art, sur Poussin, Seghers ou ses contemporains et amis Alberto Giacometti, Bram van Velde et Pierre Tal Coat. Ceux-ci illustreront de nombreux livres d’André du Bouchet.
Installé à Truinas dans la Drôme depuis de nombreuses années, André du Bouchet y décède le 19 avril 2001.
Bibliographie: Air suivi de Défets 1950 – 1953, Fata Morgana Dans la chaleur vacante, Mercure de France, 1961 Où le soleil, mercure de France, 1968 Qui n’est pas tourné vers nous. Essais sur Alberto Giacometti, Mercure de France, 1972 Ici en deux, Mercure de France, 1987 Désaccordée comme par de la neige, Tübingen, le 22 mai 1986, Mercure de France, 1989 Dans la chaleur vacante suivi d’Ou le soleil , Poésie/Gallimard n° 252,1991 Axiales, Mercure de France,992 Poèmes et proses, Mercure de France,1995 L’ajour, Poésie/Gallimard, n° 323, 1998 L’emportement du muet, Mercure de France, 2000 Traductions Au Mercure de France Paul Celan, Poèmes, traduit de l’allemand par André du Bouchet, collection Poésie, 1986 Friedrich Hölderlin, Poèmes, traduit de l’allemand par André du Bouchet, collection Poésie, 1986 Ossip Emilievich Mandelstam, Voyage en Arménie, traduit du russe par André du Bouchet, collection La Grappe, 1984 Aux Éditions Gallimard William Faulkner, Le Gambit du cavalier, traduit de l’anglais par André du Bouchet, collection Du Monde Entier, 1951 James Joyce, Giacomo Joyce, traduit de l’anglais par André du Bouchet, collection Du Monde Entier, 1973
Les mots traversent l’éther de la page. A peine veut-on les saisir, entre deux doigts de fée, qu’ils meurent et renaissent plus loin : comme à ce jeu, vous en souvenez-vous, où il est question d’un bois, et où demande est faite au loup de signaler sa présence. Semblablement, le lecteur y est lorsque l’auteur n’y est plus, tous deux se cherchant en vain dans la forêt de Langue d’Or.
Lire. Déplier l’échelle qui est dans l’âme, dont les degrés se perdent de vue, vers le haut comme vers le bas.
*
Il faut que le noir s’accentue pour que la première étoile apparaisse.
*
Très peu de vraies paroles s’échangent chaque jour, vraiment très peu. Peut-être ne tombe-t-on amoureux que pour enfin commencer à parler. Peut-être n’ouvre-t-on un livre que pour enfin commencer à entendre.
*
Pour qu’une chose soit vraie il faut qu’en plus d’être vraie elle entre dans notre vie.
*
Écrire c’est parler à l’intérieur du silence, sans froisser le silence.
*
Vous ouvrez un livre et il vous entend.
*
Christian Bobin est un écrivain et poète français.
Après avoir étudié la philosophie, il a été rédacteur à la revue Milieux; il a également été infirmier psychiatrique.
Ses premiers textes, marqués par leur brièveté et se situant entre l’essai et la poésie, datent des années 1980. Ils sont publiés aux éditions Brandes, Paroles d’Aube, Le temps qu’il fait, chez Théodore Balmoral, et surtout chez Fata Morgana (où il publie notamment Souveraineté du vide et Lettres d’or).
Connaissant le succès à partir notamment d’Une petite robe de fête (1991), il reste un auteur assez discret.
En 1992, il rencontre un autre succès, grâce à un livre consacré à saint François d’Assise: Le Très-Bas, Prix des Deux Magots en 1993 et Grand Prix catholique de littérature. Il publie en 1996 La Plus que vive, hommage rendu à son amie Ghislaine, morte à 44 ans d’une rupture d’anévrisme.
Ses thèmes de prédilection sont le vide, la nature, l’enfance, les petites choses.
Christian Bobin est l’écrivain de l’introspection, avec peu de récits constitués, mais bien plutôt des fragments. Il parle lui-même de « tricotage » de textes !
Ses livres ouvrent sur une intériorité apaisée, comme après une tempête.
Le poète fait l’éloge du presque rien : » Nous n’avons que ça, la vie la plus pauvre, la plus ordinaire, la plus banale », mais en revanche, » de temps en temps, nous revêtons un manteau de puissance, un manteau d’aisance » et il semble bon, pendant un temps, « d’apprendre à faire un pas en arrière, quitter ses sources, ses projets, ses ambitions – ils vous retrouveront – les quitter momentanément, et devenir pur regard« .
Chroniqueur, il tient la rubrique « Regard poétique » pour le bimensuel Le Monde des Religions. Il a également préfacé ou postfacé quelques ouvrages, notamment deux livres de Patrick Renou.
Il reçoit le Prix d’Académie 2016 pour l’ensemble de son œuvre.
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