*
il y a la porte dans la chambre
qui se rapproche
il y a les larmes noires
d’un sang qui circule
peut-être trop entre
nous il y a la chambre
gauche qui clôt ses paupières
et il y a la tête et la main
qui remontent
la couette entre nous
il y a l’indicible plume
d’un regret sans cause
sans lumière
elle se perd dans la distance des peaux
et la porte rapproche
toujours davantage
la peur du départ
*
rien n’a changé
le bureau se trouve toujours
à côté. une pièce se joue
par les ombres des arbres
contre le plafond et la Seine
s’écoule. c’est la nuit. rien
sauf les mots
où on ne se reconnaît
plus. et le silence
qui est une langue
plus lourde que nos épaules
qui ne se touchent
plus.
*
je recule
devant l’immense
image d’espace
parfois il manque
à mon regard
moi-même
de même que la forme
et la couleur du hasard
de ce qui m’environne
et je sais que je ne pourrais jamais accueillir en moi
qu’un quart ou moins
mais un quart
d’espace
c’est déjà la silhouette
déracinée des pieds
jusqu’à la tête
une fleur cueillie dans le temps
qui s’efface
c’est déjà un filament
l’étincelle allumée
par mon désir – du bûcher présent
*
les amours
soufflées. perdues.
un à un passé
sous mes pieds
la terre tremble
rugit sans traces
la mémoire les efface
jusqu’à la pâleur des pierres
je pleure je souris
c’est comme ça.
*
tout le monde part
dehors
même la vie
dedans
fuit
le temps passe
sans traces
que nous
devant l’immense
bouche béante
autour du nœud
« moi »
tout se détache
même la peau se relâche
et les nerfs se délient
« je » fuis
*
mon corps
un poids parmi tant d’autres
dans cet espace-là
présentement
mon corps presse contre les herbes vertes à Montsouris
sur une colline
le bleu du ciel est partout je dirais
les herbes vertes pressent contre mon corps à Montsouris
dans une vallée
partout brille le bleu du ciel je dirais
une impression condensée
nous submerge
elle à mes côtés
ou moi en corps
à côté d’elle
on meut en réalité
tout ce qui est présent
rythmé
aux accents
d’une surfaces et de secondes
accidentels – on respire
quel soulagement de le ressentir – on vit
encore en corps
la pelouse pulse fort
*
le souffle silencieux
centrifuge l’univers dans ses yeux
/ j’attends en mouvement
que l’étincelle du silex
révèle la motion des cieux
*
Joep Polderman est une poète née à Zutphen (Pays-Bas) en 1994. Après un séjour aux États-Unis, elle s’installe à Paris en 2012 où elle apprend le français et obtient des diplômes en histoire de l’art (2016, Panthéon-Sorbonne) et en littératures françaises (Sorbonne, 2019). Pendant ses années d’études, elle commence à composer des poèmes et d’autres textes en français. Elle a publié sang aux Éditions de La Crypte. Plusieurs textes poétiques ont paru dans les revues Point de Chute et Hurle-Vent (printemps 2021). Elle partage également des extraits, des brouillons, des dessins et des sources d’inspiration sur son compte Instagram (@premières.feuilles).
Son site: www.joeppolderman.com

Mai 27, 2022 @ 08:34:54
Merci pour la découverte ! 🙂
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Mai 27, 2022 @ 10:03:33
Plaisir Kilda :).
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Juin 01, 2022 @ 17:10:49
Merci, Joep Polderman, d’écrire en toute simplicité.
Presque en toute humilité, ses mots du quotidien semblent battre au cœur du rythme naturel de la vie qui se déroule droit devant nos yeux… devant ses yeux, et tout bonnement, tout simplement, elle nous raconte presque candidement ce qu’elle voit, ce qu’elle perçoit ! Comme si son monde imaginaire serait quelque chose de tangible qui prendrait forme et vie sur un écran droit devant elle, comme un décor mouvant sans cesse renouvelé!
Merci Christophe pour cette belle découverte!
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